D’autres papes ont déjà répondu à la demande de Notre-Dame de Fatima depuis les apparitions de 1917 mais face à l’urgence, aux bombardements, aux civils assassinés et aux nombreuses victimes que cette guerre produit nous ne pouvons que nous réjouir de cette initiative.
Le peuple ukrainien à besoin de notre aide matérielle, c’est certain, mais il a tout autant besoin de la mobilisation générale des chrétiens du monde pour demander au Seigneur la paix par l’intercession de Marie.
Comment faire concrètement ? Ici, les demandes de Marie à Fatima confirment les dévotions populaires de toute la tradition de l’Église. Prier le chapelet, faire pénitence et avoir une dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Pour les laïcs, ce n’est pas toujours évident de vivre ces choses dans le quotidien de nos vies. La providence veille sur nous et nous offre, dans cette actualité terrible, le témoignage de la bienheureuse Pauline Jaricot qui a vécu ces engagements à la suite de Marie.
1 – Prier le chapelet
« J’avais entendu parler des admirables effets du saint rosaire, écrit Pauline Jaricot, et j’espérais que, s’il m’était possible de ranimer cette dévotion, elle produirait dans les âmes des fruits de vie… La méditation des mystères du Rosaire m’a convaincue que le salut de la France comme celui de l’univers est uniquement dans la connaissance des mystères de la vie et de la mort d’un Dieu fait homme… Le Rosaire est comme une histoire abrégée de la vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de Marie. C’est un livre ouvert à tous, un fruit qui donne un goût de Dieu, une connaissance de ses mystères, une tendresse d’amour, une abondance de consolations… Toutes les œuvres de la Rédemption ne se résument-elles pas dans l’amour du Cœur de Jésus pour les hommes, amour qui fut partagé par le Cœur de Marie[1] ».
Toute l’histoire de l’Ancien et du Nouveau Testament se résume parfaitement dans le mot Cœur. Cœur tout donné de notre Seigneur aux hommes qui ne cessent de Lui fermer le leur (Genèse). Cœur de pierre que Dieu veut transformer en un cœur de chair (Prophètes). Cœur Sacré de Jésus uni, pour toujours, au Cœur Immaculé de Marie qui viennent renouveler quotidiennement, partout dans le monde le sacrifice de la Croix sur les autels pour que nous soyons définitivement rachetés (Nouveau Testament).
Nous sommes libres, nous sommes pécheurs, nous sommes tout petits mais cette confiance que nous mettons dans ces « cœurs adorables » font que, malgré nous, malgré ce que nous sommes, Dieu nous aime et ne se lasse pas de nous attendre comme le père attend le fils prodigue dans l’Évangile (Luc 15, 11-32). Cette promesse que nous méditons dans le rosaire nous permet de souhaiter la conversion de chacun et de croire que c’est possible.
Il y a, pour tous les grands pécheurs, « un chemin de Damas » qui peut tout changer, tout renouveler. D’un tueur fou et sanguinaire, Dieu peut faire un apôtre de l’amour.
C’est cette confiance folle, cette espérance contre toute espérance (Rom 4, 18) que la prière régulière du chapelet infuse dans nos pauvres cœurs. Ainsi ce n’est plus la crainte qui guide nos pensées mais la certitude que « l’espérance ne déçoit pas » (Rom 5, 5).
Si le chapelet parait trop long, organisons-nous pour créer des groupes du rosaire vivant comme Pauline Jaricot faisait avec ses pauvres ouvrières « réparatrices du Cœur de Jésus », son « bataillon sacré ». Proposons à 4 personnes de notre entourage de prier une dizaine pour la paix et la conversion des pécheurs.
Ayons la certitude que Dieu nous écoute et nous exaucera comme nous l’a dit la Vierge Marie à Pontmain : « Mais priez mes enfants. Dieu vous exaucera en peu de temps. Mon Fils se laisse toucher. »
2 – Faire des sacrifices en réparation
« Je vous bénis, mon Dieu, car vous m’avez élue pour la souffrance. Je veux tout, j’accepte tout et ne vous demande que trois choses : le triomphe de l’Eglise, le salut de la France et la conservation de la foi dans toute sa pureté pour ma bien-aimée ville de Lyon. » Ces mots de Pauline Jaricot, prononcés quelques jours avant sa mort, ont été notés et gardés précieusement par Maria Dubouis, « l’ange » qui veilla sur elle jusqu’au bout. C’est un mystère, parmi d’autres, que la notion de sacrifice. Le Seigneur n’est-il pas venu pour nous libérer de la souffrance ? Pourtant Saint Paul écrit aux Colossiens : « Maintenant je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous ; ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps qui est l’Église. » (Col. 1, 24)
Que devons-nous comprendre de cet appel aux sacrifices ?
La tentation est grande aujourd’hui de penser qu’un seul homme est responsable du désordre international. Il faut pouvoir le dire tout simplement, aucun cœur n’est tout à fait mauvais comme le nôtre n’est pas tout à fait bon. Dans l’Ancien Testament les menaces extérieures sont toujours liées à des menaces intérieures plus graves encore … Orgueil, avarice, jalousie, colère, luxure, gourmandise et paresse. Dans la demande de Marie à Fatima, la promesse de paix est inextricablement liée à celle de la pénitence personnelle.
Dans L’Archipel du Goulag, Soljenitsyne écrivait si justement à propos du sentiment que d’aucuns ressentent aujourd’hui : « Ah, si les choses étaient si simples, s’il y avait quelque part des hommes à l’âme noire se livrant perfidement à de noires actions, et s’il s’agissait seulement de les distinguer des autres et de les supprimer ! Mais la ligne de partage entre le bien du mal traverse le cœur de chaque être humain. Et qui est ira détruire un morceau de son propre cœur ? »
La pénitence revient à reconnaître humblement tous les jours ce qui fait défaut dans nos attitudes et nos paroles. Toutes les fois où nous manquons de charité, toutes les fois où notre regard se détourne des misères, toutes les fois où nous négocions, au rabais, l’Évangile de Jésus, toutes les fois où nous ne sommes pas à la hauteur, toutes ces fois nous entendons – comme le pauvre saint Pierre – le coq chanter trois fois. C’est l’exemple et le témoignage même laissé par le moine et martyr de Tibhirine, Christian de Chergé : « Ma vie n’a pas plus de prix qu’une autre. Elle n’en a pas moins non plus. En tout cas, elle n’a pas l’innocence de l’enfance. J’ai suffisamment vécu pour me savoir complice du mal qui semble, hélas, prévaloir dans le monde et même de celui-là qui me frapperait aveuglément. »
Profitons ensemble de ce temps de carême pour offrir au Seigneur nos fragilités et demander humblement pardon pour toutes nos fautes.
La réconciliation du monde commence avec la paix de nos cœurs.
La paix de nos cœurs commence avec le sacrement de la réconciliation.
3 – Dévotion au Cœur Immaculé de Marie
« Marie a été conçue sans péché. »
La bienheureuse Pauline Jaricot fait inscrire cette phrase sur les frontons des portes de la maison de Lorette à Lyon où elle vécut 30 ans. Avant même que les médailles de la rue du bac soient frappées et distribuées massivement, Pauline Jaricot distribue des médailles en très grand nombre pour que Marie accompagne les hommes et les femmes de son temps. Parce que le cœur même de notre vie avec Jésus, c’est Marie, voulue depuis les commencements telle qu’elle fut créée, c’est-à-dire sans péché. Pauline Jaricot se met sous la garde de l’Immaculée pour que Marie la protège du Démon. Comment ne pas voir dans la guerre qui assaille les Ukrainiens, les marques, une fois de plus, de l’ange déchu. Le nom même de l’Immaculée le fait trembler jusque dans les enfers parce qu’il sait que son talon n’est jamais loin de sa tête.
Pour bien comprendre la grandeur du mystère de l’Immaculée, il faut relire Le Secret de Marie de Saint Louis-Marie Grignion de Montfort : « Dieu a fait un monde pour l’homme voyageur, c’est celui-ci ; il a fait un monde pour l’homme bienheureux et c’est le paradis ; mais il en a fait un autre pour lui, auquel il a donné le nom de Marie. »
Ce monde dans lequel nous vivons, créé pour l’homme voyageur, Dieu nous l’a donné après le péché originel. Au moment où il aurait pu éclater de colère contre Adam et Eve, le Seigneur a offert aux premiers hommes et à leur descendance une terre extraordinaire et belle pour vivre. Certes ce n’est pas sans peine que nous traversons cette vie mais nous pouvons nous émerveiller du monde créé par Dieu avec amour. Le monde que Dieu s’était réservé, Marie, il l’offre aux hommes sur la Croix. Après avoir été flagellé, humilié par les épines, insulté, roué de coups, après avoir subit l’infâme voie de douleurs sous les cris de la foule, Jésus – dans un sursaut Divin d’amour et de miséricorde infinis – nous offre sa Sainte Mère. Par ses prières, par sa douceur et par sa fidélité jusqu’au pied de la croix où elle se tient debout, Marie aura raison de nos pauvres cœurs.
Son Cœur Immaculé ne triomphera pas du monde, c’est Jésus qui a vaincu le monde (Jn 16, 33), il triomphera dans le monde parce qu’Il triomphera dans nos cœurs. La vie de Pauline Jaricot enseigne une forme de martyr à laquelle tous les catholiques sont appelés par le Christ. Ce martyr est au long cours, en renonçant tous les jours un peu plus à nos péchés, au vieil homme en nous. Le Cœur de Marie vient prendre la place lorsqu’on Lui demande de venir triompher en nous. Petit à petit, comme des flambeaux qui s’embrasent au contact les uns des autres, le Cœur de Marie triomphera dans le monde jusqu’au retour du Christ dans la gloire.
Ayons confiance en Marie et gardons la ferme espérance que si nous nous convertissons et si nous suivons le Christ avec ardeur et sans trembler, notre flamme, de flambeau en flambeau embrasera le cœur de tous les pécheurs.
Prions pour que ce monde s’embrase non pas des bombes méphistophéliques mais de l’Esprit Saint qui n’attend que notre libre participation et consentement pour faire advenir la grande période de paix promise par Marie à Fatima.
Ô Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous
[1] Une Âme de Feu – Sr M. Monique de Jésus op – Ed Fontanelle 2005 – p 85-86
